Le légendaire Régiment de chasse 2/30 Normandie Niémen stationné sur la BA 118

Le légendaire Régiment de chasse 2/30 Normandie Niémen stationné sur la BA 118 (1/1)

Pour faire suite à cette chronique mensuelle des évènements des années en 4 en lien avec l’histoire locale de l’aviation ou celle de la base aérienne, Le Petit Journal vous propose ce mois-ci un article concernant le légendaire Régiment de chasse 2/30 Normandie Niémen stationné sur la BA 118 de Mont-de-Marsan depuis 2012.


En effet, c’est en juillet 1944 que, par autorisation du maréchal Staline, le groupe de chasse n° 3 Normandie a gagné le droit d’y accoler le nom de Niémen suite à la conquête du fleuve du même nom.


La genèse du groupe


Dans les toutes premières heures du samedi 22 juin 1941 débute l’opération Barbarossa. L’armée allemande envahit l’URSS. Cette offensive entraîne la rupture des relations diplomatiques entre Moscou et le gouvernement du Maréchal Pétain. Sur le chemin du retour vers Paris, le lieutenant-colonel Luguet, qui occupait le poste d’attaché de l’Air, profite de l’escale d’Istamboul pour fausser compagnie à la diplomatie vichyste avec le dessein de rallier la France libre.


À son arrivée à Londres, fin 1941, il livre au capitaine Mirlesse, du 2e bureau des Forces Aériennes Françaises Libres (FAFL), son analyse du front de l’Est, avec une guerre d’usure qui ne peut que tourner à l’avantage des Soviétiques.


Les deux hommes réussissent à convaincre le général De Gaulle d’envoyer une force combattante française en URSS. Pour le fondateur de la France libre, l’enjeu d’une telle démarche ne se limite pas au plan militaire. Il y entre aussi d’incontestables considérations politiques. Par cette présence française, fût-elle symbolique, De Gaulle souhaite, aux yeux des Soviétiques qui l’ont reconnu comme chef de tous les Français libres, combler le vide laissé par le départ de la représentation de Vichy. Il est alors en froid avec les Anglais et les Américains, un rapprochement avec les Soviétiques pourrait faire contrepoids à la domination anglo-saxonne. En outre, de Gaulle prépare aussi l’après-guerre où il aura besoin de l’appui du Parti Communiste Français, entré en résistance en juin 1941.


Quel appui accorder aux Russes ? Tout d’abord, de Gaulle pense proposer aux Soviétiques l’envoi sur le front de l’Est d’une division mécanisée, prélevée sur les forces françaises stationnées au Levant. Les Anglais y sont opposés. Luguet insiste pour la constitution d’une unité aérienne composée de pilotes et de mécaniciens. En février 1942, De Gaulle donne son aval à Luguet pour parler à la mission soviétique à Londres. Au printemps 1942, Joseph Staline donne son accord de principe à l’envoi d’un groupe de chasse en URSS. Il espère ainsi que De Gaulle plaidera pour l’ouverture d’un second front en Europe de l’Ouest.


Le 1er septembre 1942, De Gaulle obtient du gouvernement soviétique la création d’un groupe de chasse autonome au sein de l’armée rouge. Le dénommé « Groupe de chasse n° 3 » sera composé de 14 pilotes, d’une quarantaine de mécaniciens, plus le personnel administratif. À noter que seuls 7 pilotes totalisent les 150 heures de vol requises ; les autres ont menti afin de pouvoir être acceptés. Pour se conformer aux us et coutumes soviétiques qui veulent que les pilotes soient tous officiers, les sous-officiers sont tous temporairement élevés au grade d’aspirant.


Au sein des Forces Françaises Libres, les groupes aériens portent le nom d’une province française. Le commandant Pouliquen nommé à la tête de l’unité voudrait la baptiser du nom de sa région natale, la Bretagne, mais celui-ci est déjà pris ; le groupe portera le nom de Normandie.


L’unité comprend des jeunes gens venus d’horizons géographiques et sociaux différents. Il y a des nobles, des bourgeois, des ouvriers, des étudiants, des gens de droite, des gens de gauche, des apolitiques… Pilotes et personnel technique sont rassemblés à partir du début du mois de septembre sur la base de Rayack, au Liban.


L’arrivée en URSS


Le jeudi 12 novembre 1942, c’est le grand départ vers le front de l’Est en passant par les pays du Levant, un théâtre d’opérations et des conditions de vie à des années-lumière de tout ce qu’ont pu connaître jusque-là les pilotes et les mécaniciens.


Le 29 novembre 1942, le GC 3 atteint la base d’Ivanovo, ville située à 250 km au nord-est de Moscou.


Après avoir testé les différents types d’appareils, dont certains anglais ou américains, proposés par le commandement soviétique, le commandant d’unité Jean Tulasne et son adjoint, le capitaine Albert Littolff, arrêtent leur choix sur le Yak soviétique, ce qui va droit au cœur de leurs hôtes.


L’instruction des Français va durer du 2 décembre 1942 au 14 mars 1943.


Après inspection en mars 1943, le GC 3 est déclaré apte à rejoindre le front et part pour la base de Polotniany Zavod où il est intégré à la 303e division de l’air soviétique.


La première campagne (mars-novembre 1943)


Dans un premier temps, le groupe a pour mission d’escorter des bombardiers soviétiques. Le baptême du feu a lieu le 5 avril 1943 quand une première rencontre avec la Luftwaffe se solde par deux appareils allemands abattus et le retour de tous les chasseurs et bombardiers à la base.


Désormais, les combats et les pertes vont se succéder à un rythme soutenu et Londres devra envoyer des renforts dès le mois de mai. Le 19 juin, pour la première fois, le quotidien soviétique La Pravda évoque dans ses colonnes la bravoure des pilotes français décorés de « L’ordre de la guerre pour la patrie ».


Lors de la bataille d’Orel, du 12 au 19 juillet 1943, les Français aux commandes des nouveaux Yak-9 font 112 sorties, descendent 17 avions ennemis, mais en perdent 6.


Le 17 juillet 1943, lors de la bataille de Koursk, dans le Sud-Ouest de la Russie, le commandant Tulasne est tué au combat, il est remplacé par le commandant Pouyade.


Les mécaniciens français, épuisés, car trop peu nombreux, rentrent au Moyen-Orient en août. Ils sont remplacés par des mécanos russes, ce qui ne va pas sans poser des problèmes de communication, mais permet aussi de tisser des liens forts entre Français et Soviétiques.


Les résultats sont là, mais les pertes également : en six mois, 21 pilotes sont tués, faits prisonniers ou ont disparu, 4 ont été blessés.


Retiré exsangue à l’orée de l’hiver, le groupe va séjourner jusqu’au printemps 1944 à Toula.


Le 29 décembre 1943, le général Bouscat, chef d’État-major général « air » donne à la Normandie un statut de régiment de type R (R comme russe) à quatre escadrilles grâce au renfort de 33 pilotes venus d’Afrique du Nord. L’intégration des nouveaux venus ne se fait pas sans frictions : certains d’entre eux se sont illustrés au sein de l’Aviation de Vichy et leurs relations avec les anciens des FAFL ne sont pas les meilleures. Les premiers combats resserreront les liens et ces querelles seront vite oubliées… A suivre. Michel Le Bourhis.


 La 2e et 3e campagne, dans notre prochaine édition.


Si d’autres lecteurs souhaitent en savoir davantage sur l’histoire du Normandie-Niemen, l’histoire de l’aviation à Mont-de-Marsan, l’histoire de l’aéro-club des Landes, la construction, le bombardement de la base aérienne et ses transformations suivantes, nous les invitons à venir nous retrouver les mercredi ou jeudi à l’Espace Patrimonial Rozanoff, le musée de la Base aérienne 118.


Renseignements sur le site : https://epr118.fr/pages/contact.html ou auprès de l’office de tourisme.

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